• Maximilien MERCEREAU (1898-1917)

    Maximilien Etienne Raphaël MERCEREAU naît le 21 janvier 1898, section Rouland, au Bois. Il est le fils de Victor Raphaël MERCEREAU, cultivateur, et de Clémentine Marie Léontine HENRY.

    Elève en pharmacie, Maximilien est incorporé au 26e bataillon de chasseurs comme engagé volontaire pour la durée de la guerre le 26 décembre 1916 à la mairie de La Rochelle. Il arrive au corps le 29 décembre.

    Le 19 février 1917 il part en renfort au 26e Bataillon de Chasseurs.

    Le 27 mai 1917 il passe au 2e Bataillon de Chasseurs à Pied (2e BCP).

    Le 26 juin 1917 il écrit le texte suivant qu'il fait parvenir au Soldat Rétais :

    Souvenirs de cantonnement
    Nous avons reçu d'un jeune poilu les impressions suivantes. Nos lecteurs admireront avec nous la fraîcheur des pensées et le charme du style. Ces pages leur rappelleront d'ailleurs la collaboration des premiers jours de notre jeune écrivain, auquel nous envoyons au fond de sa tranchée notre plus cordial souvenir.
    Neuf heures du soir... la campagne Lorraine s'endort et lente, la brume crépusculaire glisse dans la vallée. Le petit village de M... assis parmi les vignes, sur le flanc de la colline, conserve, derrière son rideau d'arbres, les lueurs indécises du jour mourant.
    Dans l'air tiède flotte une buée qui grise et que la brise chaude de ce soir de Juin apporte des rives lointaines du plateau.
    Senteurs enivrantes des foins coupés, à laquelle se mêle le suave parfum des cerises mûres et des prunelles vertes, qu'accompagnent l'odeur âpre des grands noyers et celle plus subtile des vignes en fleurs et des houblonnières...
    Il fait bon respirer. La vie semble souriante et douce. On veut s'y attacher et comme jadis vivre de son charme, au clair des étoiles.
    Mais quelques kilomètres plus avant le canon sournoisement fait entendre sa voix, là où les parfums grisants sont ceux qu'exhale la poudre, et les horizons rouges, ceux qui ne sont estompés que par les ruines et les incendies...
    La nuit, même ici, n'aura pas la douceur des nuits d'antan. Rythmée par la note grave du canon, troublée de temps à autre par le roulement des camions, le pas sonore des chevaux et des caissons, elle sera tout à l'heure le théâtre de vols audacieux ; de randonnées sournoises et criminelles. Les aigles noirs se glisseront invisibles, dans la nuit, essayant d'y semer la mort.
    Je retourne au village car l'heure de l'appel approche en même temps que celle du sommeil.
    A l'entrée sur la crête, dominant l'horizon, s'élève le vieux cimetière. D'anciennes tombes oubliées ou pieusement entretenues, s'élèvent ; d'autres plus récentes, celles des deuils d'hier où croissent encore les œillets et les premières roses... et parmi ces tombes de granit noir quelques-unes que surmontent la cocarde tricolore et où dorment les braves tombés les premiers à la défense de la Patrie.
    Derrière c'est le cimetière neuf ; celui que la guerre a creusé ; la fosse où dorment réunis dans la même tombe l'officier et le soldat, le bambin et l'homme grisonnant ensevelis, pour la même Cause et grandis du même holocauste.
    L'ombre grandit et s'étend peu à peu sur les allées silencieuses, sur les croix blanches, longuement alignées, sur les cocardes aux trois couleurs, sur les tertres que des mains pieuses de femmes ont fleuris.
    Je passe. Quelques-unes, beaucoup même de ces tombes sont enrichies de perles et de couronnes. Mères en deuil qui sont venues pleurer leurs fils et ont laissé la trace de leur passage ; Epouses en pleurs qui ont prié avec leurs enfants sur la tombe du Père mort ; Camarades de combat qui ont déposé sur les restes de leurs amis l'expression de leur reconnaissance.
    Je remarque, une petite croix blanche, sur laquelle est fixée une plaque de marbre avec un portrait de jeune homme, puis une couronne toute simple, une miniature de couronne avec ces deux inscriptions.
    "A mon René" -- "A mon Papa"
    Et je m'arrête malgré le jour qui décroît. Je me découvre devant cette croix de bois blanc, où déjà les ombres nocturnes glissent comme de longs fantômes. Un murmure de prière me monte aux lèvres et les pensées les plus diverses tour à tour m'assiègent.
    L'inscription est toute neuve. "1917".
    Une toute jeune femme est passée par là sans doute. Elle a erré dans ces allées silencieuses ; l'œil hagard et l'âme angoissée elle a cherché parmi ces héroïques victimes, celle qui un jour, encore proche, lui avait donné son nom : elle s'est agenouillée, elle a pleuré sur ce tertre encore frais et c'est l'adieu que son amour et sa douleur a dicté.
    "A mon René"
    Mais à cet appel suprême, la voix caressante de l'enfant répond : de l'enfant qui ne connaît encore pas les souffrances de la douleur ni les affres du désespoir ; du bambin qui ignore tout des horreurs de la guerre, de la malice et de la brutalité des hommes ; du petit innocent qui reste et qui demain devra grandir selon l'honneur du Père et dans le souvenir du disparu ; de l'être, unique espoir des déchirements intimes, qui répond par l'appel naïf à l'adieu de la mère.
    "A mon Papa"
    Il fait nuit. Déjà les rues de M... deviennent silencieuses, dans les nuages blancs grandit le ronflement sonore d'une patrouille d'avions, quelques 105 éclatent dans l'air et les schrapnells illuminent l'espace. C'est l'heure où dans le village, et les villes d'alentour, les lumières une à une s'éteignent afin de ne pas éveiller l'attention des farouches oiseaux noirs, rôdeurs de nuits...
    Quelques notes d'un couplet parisien accompagnent encore une mélodie de violon et de guitare, les dernières chopes de bières se vident et les attardés rentrent, égayés parfois par le sournois "petit gris" de la Moselle...
    M. MERCEREAU
    En Lorraine 26 juin 1917

    Le 13 octobre 1917, à 11h30, Maximilien est tué par accident au cantonnement de Dieulouard (Meurthe-et-Moselle).

    Le Soldat Rétais du 1er novembre 1917 fait part de son décès (sous la rubrique "Saint-Martin" :

    Nous avons la profonde douleur de faire part à nos lecteurs de la mort de notre jeune et regretté compatriote Maximilien Mercereau des Chasseurs à Pied.
    Bien que cette mort n'est pas confirmée officiellement, les informations privées actuellement parvenues ne permettent pas de douter de cette affreuse nouvelle.
    Cette mort frappe douloureusement plusieurs œuvres paroissiales, notamment la Chorale Jeanne d'Arc et la société de gymnastique l'Alerte dont le défunt était un membre apprécié.
    Elle atteint vivement aussi le "Soldat Rétais" qui était heureux de compter ce jeune homme au nombre de ses collaborateurs.

     

    Quinze jours plus tard le même journal donne des précisions sur les circonstances du décès :

    La famille de notre regretté collaborateur Maximilien Mercereau, recevait dimanche dernier une lettre de son Commandant, confirmant la pénible nouvelle que nous publions dans notre dernier numéro.
    Notre ami était au bureau du Commandant où il avait été désigné par sa compagnie pour remplir les fonctions d'agent de liaison.
    Se trouvant en compagnie de quatre camarades, c'est là, qu'il trouva la mort en s'instruisant sur le pistolet automatique de l'un d'eux. Il reçut la décharge à la tête et la mort fut instantanée.
    Les funérailles furent celles d'un héros. La Messe fut dite à l'Eglise du cantonnement et les honneurs militaires ont été rendus par tout le bataillon. La dépouille mortelle de ce brave, repose dans le cimetière de D...
    "Excellent chasseur, bon, plein de zèle et de dévouement aimé de ses camarades, estimé de ses chefs, votre fils que je salue très bas, est mort pour la France."
    Telles sont les belles paroles par lesquelles le Commandant salue la mémoire du vaillant disparu.
    Puisse cet hommage, être un adoucissement pour ceux qui pleurent, auxquels nous renouvelons l'expression de nos bien sincères condoléances.

    Le Soldat Rétais du 2 décembre relate ses funérailles à Saint-Martin :

    C'est au milieu d'une foule nombreuse, que fut célébré le 22 novembre en l'Eglise paroissiale un service funèbre solennel, pour l'âme de Maximilien Mercereau. A cet effet, des invitations au nom de l'Alerte et de la famille avaient été distribuées à St-Martin et au Bois.
    Les sociétés "l'Alerte" et "La Rétaise" de St-Martin, ainsi que la société "Pour la France" avaient pris place dans le chœur. Dans l'assistance on remarquait des membres du Conseil municipal, des autorités militaires et plusieurs notabilités de la ville, des enfants de la ville, les enfants des orphelinats et des écoles.
    La cérémonie se déroula dans le plus profond recueillement. La Messe était célébrée par M. l'Abbé Cherbonnier, prêtre-soldat, pendant que de la tribune, s'élevait doux et pieux, préparés avec soin, les chants de la messe des morts, chantés à plusieurs voix.
    Après l'Elévation, Mgr Lartigue chanta avec la diction et le talent qui lui sont connus le motet : Orbis Redempti.
    Avant l'Absoute, donnée par lui-même, il prononça une vibrante allocution, dans laquelle il retraça les vertus familiales et militaires, les grandes qualités de cœur et d'esprit du défunt, rappelant le bel avenir qui s'ouvrait devant ce brave et les grandes espérances qu'il donnait, mais qui sont aujourd'hui enfermées dans une tombe, si prématurément ouverte en de bien cruelles circonstances.
    Avec une émotion profonde et communicative, Mgr Lartigue évoqua le souvenir de la fête sportive où la famille chrétienne de Maximilien avait généreusement ouvert ses portes aux sociétés de la région. Il salua sa chère Alerte, qui voit disparaitre au service de la Patrie le quatrième de ses membres. Dans une très belle envolée oratoire, il s'inclina devant le drapeau tricolore qui contient dans ses plis, avec les grandeurs de la France, la mémoire de nos héros.
    En termes délicats et affectueux, il exprima ses condoléances aux familles, et remercia les sociétés "La Rétaise" et "Pour la France" ainsi que toute l'assistance d'être venues témoigner leur sympathie à ceux qui pleurent. Il termina en rappelant la gloire éternelle réservée à ceux qui sont morts au service du pays.
    A l'issue de la cérémonie, la foule très émue défila devant les familles, auxquelles le "Soldat Rétais" renouvelle l'hommage de ses condoléances attristées.

    Son corps repose au cimetière de Dieulouard.

    Le nom de Maximilien MERCEREAU est inscrit sur le monument aux morts de Saint-Martin, ainsi que sur la plaque commémorative de l'église.

     

    Sources :

    Acte de naissance : http://www.leboisplage.com/data/default/etat-civil/pdf/naissance/1898N002.pdf

    Fiche matricule : AD17 - Registres matricules - 1 R 467 - Classe 1918 - La Rochelle, vue 48

    Historique du 2e BCP : http://tableaudhonneur.free.fr/2eBCP-Chapelot.pdf

    Fiche Mémoire des Hommes : http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/ark:/40699/m005239f732a10ff/5242bf42c55cd

    Musée Ernest-Cognacq - Le Soldat Rétais n° 61, 15 juillet 1917

    Musée Ernest-Cognacq - Le Soldat Rétais n° 69, 1er novembre 1917

    Musée Ernest-Cognacq - Le Soldat Rétais n° 70, 15 novembre 1917

    Musée Ernest-Cognacq - Le Soldat Rétais n° 71, 2 décembre 1917

    « Alexandre PHILIBERT (1897-1917)Adrien Henria GOUMARD (1886-1917) »

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